samedi 16 novembre 2013

Venise - Venezia en camping-car

En route pour Venise en cette fin d'octobre. Nice --> le camping "Le Miramare"en camping-car, environ 7 heures de route avec la pause repas... presque rien ! Le camping est quasiment vide. Les emplacements sont suffisamment grands pour être bien installé. Le seul bloc sanitaire ouvert fin octobre n'est pas très propre. Il vaut mieux utiliser la douche du camping-car...
Mais il fait beau et tout est parfait. Du camping, l'accès au Vaporetto à pied se fait facilement. La ligne 15 amène directement et rapidement à la place Saint Marc.
Quelques photos pour le plaisir...












J'ai presque peur, en vérité - poème de Paul Verlaine

J'ai presque peur, en vérité

J'ai presque peur, en vérité,
Tant je sens ma vie enlacée
À la radieuse pensée
Qui m'a pris l'âme l'autre été,

Tant votre image, à jamais chère,
Habite en ce coeur tout à vous,
Mon cœur uniquement jaloux
De vous aimer et de vous plaire ;

Et je tremble, pardonnez-moi
D'aussi franchement vous le dire,
À penser qu'un mot, un sourire
De vous est désormais ma loi,

Et qu'il vous suffirait d'un geste.
D'une parole ou d'un clin d'oeil,
Pour mettre tout mon être en deuil
De son illusion céleste.

Mais plutôt je ne veux vous voir,
L'avenir dût-il m'être sombre
Et fécond en peines sans nombre,
Qu'à travers un immense espoir,

Plongé dans ce bonheur suprême
De me dire encore et toujours,
En dépit des mornes retours,
Que je vous aime, que je t'aime !


Paul Verlaine

vendredi 14 juin 2013

La mer et l'amour, poème de Pierre de Marbeuf

 LA MER ET L'AMOUR


Et la mer et l'amour ont la mer pour partage
Et la mer est amère, et l'amour est amer.
L'on s'abîme en la mer aussi bien qu'en l'amour,
Car l'amour et la mer ne sont point sans orage.
Celui qui craint les eaux, qu'il demeure au rivage.
Celui qui craint les maux qu'on souffre pour aimer
qu'il ne se laisse pas par l'amour emporter
Car tous deux ils seraient sans hasard de naufrage
La mer de l'amour eut la mer pour berceau,
Le feu sort de l'amour, sa mère sort de l'eau.
Mais l'eau contre ce feu ne peut fournir des armes.
Si l'eau pouvait éteindre un brasier amoureux,
Ton amour qui me brûle est si fort douloureux,
Que j'eusse éteint son feu de la mer de mes larmes...


Pierre de Marbeuf

Le voyage, le comte de Ségur

Le voyage.

Par M. le comte de Ségur.

(1756-1805)



À voyager passant sa vie,

Certain vieillard, nommé le Temps ;

Près d'un fleuve arrive et s'écrie :

"Ayez pitié de mes vieux ans.

Eh quoi ! Sur ces bords on m'oublie,

Moi, qui compte tous les instants !

Mes bons amis, je vous supplie,

Venez, venez, passez le Temps."



De l'autre côté, sur la plage,

Plus d'une fille regardait,

Et voulait aider son passage

Sur un bateau qu'Amour guidait.

Mais une d'elles, bien plus sage,

Leur répétait ces mots prudents :

"Ah ! Souvent on a fait naufrage

En cherchant à passer le Temps."



L'Amour, gaiement, pousse au rivage,

Il aborde tout près du Temps ;

Il lui propose le voyage,

L'embarque, et s'abandonne au vent.

Agitant ses rames légères,

Il dit et redit, dans ses chants :

"Vous voyez bien, jeunes bergères,

Que l'Amour fait passer le Temps."



Mais tout à coup l'Amour se lasse,

Ce fut toujours là son défaut ;

Le Temps prend les rames à sa place,

Et lui dit : "Quoi, céder sitôt !

Pauvre enfant, quelle est ta faiblesse !

Tu dors, et je chante à mon tour

Ce vieux refrain de la sagesse :

Ah ! Le Temps fait passer l'Amour."



Une beauté dans le bocage

Se riait sans ménagement

De la morale du vieux sage,

Et du dépit du jeune enfant :

"Qui peut," dit le Temps en colère,

"Braver l'Amour et mes vieux ans ?"

"C'est moi" dit l'Amitié sincère,

Qui ne crains jamais rien du Temps".







(Comédies, Proverbes et Chansons, par Joseph-Alexandre Ségur, in-8°, Paris, Colnet, an x, 1802)



jeudi 13 juin 2013

Les séparés, poème de Marceline Desbordes-Valmore


 Les séparés

N'écris pas - Je suis triste, et je voudrais m'éteindre
Les beaux été sans toi, c'est la nuit sans flambeau
J'ai refermé mes bras qui ne peuvent t'atteindre,
Et frapper à mon coeur, c'est frapper au tombeau
N'écris pas !

N'écris pas - N'apprenons qu'à mourir à nous-mêmes
Ne demande qu'à Dieu ... qu'à toi, si je t'aimais !
Au fond de ton absence écouter que tu m'aimes,
C'est entendre le ciel sans y monter jamais
N'écris pas !

N'écris pas - Je te crains; j'ai peur de ma mémoire;
Elle a gardé ta voix qui m'appelle souvent
Ne montre pas l'eau vive à qui ne peut la boire
Une chère écriture est un portrait vivant
N'écris pas !

N'écris pas ces mots doux que je n'ose plus lire :
Il semble que ta voix les répand sur mon coeur;
Et que je les voix brûler à travers ton sourire;
Il semble qu'un baiser les empreint sur mon coeur
N'écris pas !

Marceline Desbordes-Valmore

dimanche 17 mars 2013

Mon amour pour avoir figuré mes désirs

Mon amour pour avoir figuré mes désirs
Mis tes lèvres au ciel de tes mots comme un astre
Tes baisers dans la nuit vivante
Et le sillage de tes bras autour de moi
Comme une flamme en signe de conquête
Mes rêves sont au monde
Clairs et perpétuels.
Et quand tu n’es pas là
Je rêve que je dors je rêve que je rêve.



samedi 9 mars 2013

Je respire où tu palpites


Je respire où tu palpites,
Tu sais ; à quoi bon, hélas !
Rester là si tu me quittes,
Et vivre si tu t'en vas ?

A quoi bon vivre, étant l'ombre
De cet ange qui s'enfuit ?
A quoi bon, sous le ciel sombre,
N'être plus que de la nuit ?

Je suis la fleur des murailles
Dont avril est le seul bien.
Il suffit que tu t'en ailles
Pour qu'il ne reste plus rien.

Tu m'entoures d'Auréoles ;
Te voir est mon seul souci.
Il suffit que tu t'envoles
Pour que je m'envole aussi.

Si tu pars, mon front se penche ;
Mon âme au ciel, son berceau,
Fuira, dans ta main blanche
Tu tiens ce sauvage oiseau.

Que veux-tu que je devienne
Si je n'entends plus ton pas ?
Est-ce ta vie ou la mienne
Qui s'en va ? Je ne sais pas.

Quand mon orage succombe,
J'en reprends dans ton coeur pur ;
Je suis comme la colombe
Qui vient boire au lac d'azur.

L'amour fait comprendre à l'âme
L'univers, salubre et béni ;
Et cette petite flamme
Seule éclaire l'infini

Sans toi, toute la nature
N'est plus qu'un cachot fermé,
Où je vais à l'aventure,
Pâle et n'étant plus aimé.

Sans toi, tout s'effeuille et tombe ;
L'ombre emplit mon noir sourcil ;
Une fête est une tombe,
La patrie est un exil.

Je t'implore et réclame ;
Ne fuis pas loin de mes maux,
Ô fauvette de mon âme
Qui chantes dans mes rameaux !

De quoi puis-je avoir envie,
De quoi puis-je avoir effroi,
Que ferai-je de la vie
Si tu n'es plus près de moi ?

Tu portes dans la lumière,
Tu portes dans les buissons,
Sur une aile ma prière,
Et sur l'autre mes chansons.

Que dirai-je aux champs que voile
L'inconsolable douleur ?
Que ferai-je de l'étoile ?
Que ferai-je de la fleur ?

Que dirai-je au bois morose
Qu'illuminait ta douceur ?
Que répondrai-je à la rose
Disant : « Où donc est ma soeur ? »

J'en mourrai ; fuis, si tu l'oses.
A quoi bon, jours révolus !
Regarder toutes ces choses
Qu'elle ne regarde plus ?

Que ferai-je de la lyre,
De la vertu, du destin ?
Hélas ! et, sans ton sourire,
Que ferai-je du matin ?

Que ferai-je, seul, farouche,
Sans toi, du jour et des cieux,
De mes baisers sans ta bouche,
Et de mes pleurs sans tes yeux !

Victor HUGO

dimanche 24 février 2013

Se voir le plus possible


Alfred de Musset




Se voir le plus possible et s’aimer seulement,
Sans ruse et sans détours, sans honte ni mensonge,
Sans qu’un désir nous trompe, ou qu’un remord nous ronge,
Vivre à deux et donner son cœur à tout moment ;

Respecter sa pensée aussi loin qu’on y plonge,
Faire de son amour un jour au lieu d’un songe,
Et dans cette clarté respirer librement ;
Ainsi respirait Laure et chantait son amant.

Vous dont chaque pas touche à la grâce suprême,
C’est vous, la tête en fleurs, qu’on croirait sans souci,
C’est vous qui me disiez qu’il faut aimer ainsi.

Et c’est moi, vieil enfant du doute et du blasphème,
Qui vous écoute, et pense, et vous répond ceci :
Oui, l’on vit autrement, mais c’est ainsi qu’on aime.