mercredi 18 mars 2009

Stances à Marquise, poème de Corneille

Pierre CORNEILLE
(1606-1684)

Stances à Marquise (1658)

Cependant j'ai quelques charmes
Qui sont assez éclatants
Pour n'avoir pas trop d'alarmes
De ces ravages du temps.

Vous en avez qu'on adore ;
Mais ceux que vous méprisez
Pourraient bien durer encore
Quand ceux-là seront usés.

Ils pourront sauver la gloire
Des yeux qui me semblent doux,
Et dans mille ans faire croire
Ce qu'il me plaira de vous.

Chez cette race nouvelle
Où j'aurai quelque crédit,
Vous ne passerez pour belle
Qu'autant que je l'aurai dit.

Pensez-y, belle Marquise,
Quoiqu'un grison fasse effroi,
Il vaut bien qu'on le courtise
Quand il est fait comme moi.

Marquise, si mon visage
A quelques traits un peu vieux,
Souvenez-vous qu'à mon âge
Vous ne vaudrez guère mieux.

Le temps aux plus belles choses
Se plaît à faire un affront :
Il saura faner vos roses
Comme il a ridé mon front.

Le même cours des planètes
Règle nos jours et nos nuits :
On m'a vu ce que vous êtes
Vous serez ce que je suis.


Corneille qui courtisait, sans succès (ainsi que Racine d'ailleurs), “Marquise” à savoir Thérès Gorla, actrice de son état, lui a écrit ce très beau poème.

Ah le temps qui passe...

Pour être optimiste, on peut aussi citer ce couplet de Brassens composée par Tristan Bernard :

"Peut-être je serai vieille
Répond Marquise, cependant
J’ai vingt-six ans, mon vieux Corneille,
Et je t’emmerde en attendant !"





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